Archive pour la catégorie ‘Non classé’

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Samedi 9 octobre 2010

Herman Casler, Mutoscope,  feuilleteur, 1894

A la fin du XIXème siècle, nombreux sont les appareils descendants des Peep shows qui tentent de recréer le mouvement de la vie réelle. Le Mutoscope est la première machine faisant l’application du principe de la persistance de la vision étudié par Muybridge et Marey. Les images prises avec un Mutograph, une des premières caméras photographiques, sont assemblées comme une roue et feuilletées mécaniquement, après l’introduction d’une pièce dans la machine, par l’action d’une manivelle à la vitesse de 16 à 18 images par seconde.
Le succès du Mutoscope fut rapide aux États-Unis, notamment dans les « penny arcade », sortes de salles de jeux de l’époque. En Angleterre, il était appelé « What the Butler Saw », du nom d’une des plus célèbres roues d’image, montrant une femme se déshabillant partiellement, comme si le majordome regardait à travers le trou de la serrure.

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Samedi 2 octobre 2010

Francisco des Goya, Tuti li mundi, lavis et crayon ou craie, 1808–14

Exposées dans les foires des grandes villes ou transportées par les saltimbanques sur des chariots à travers les campagnes, les boîtes d’optique constituaient de véritables attractions aux XVIIIème et XIXème siècle. Une certaine magie émanait de ces dispositifs qui immergeaient le grand public dans des paysages, des vues de villes et des espaces inconnus. Leurs ouvertures étaient comme des fenêtres ouvertes sur des mondes nouveaux. « Mondo Nuevo » ou « Tutilimundi »  était d’ailleurs le nom donné en Italie à ces cosmoramas portatifs, appelées également « Peep show » en Angleterre.
Fin connaisseur de la camera obscura, qu’il utilisait pour réaliser certains de ses dessins, Goya dépeint ici avec grivoiserie un jeune homme à la fois regardeur et regardé.

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Mercredi 29 septembre 2010

Santiago Sierra, 34 cm., 2009, Prometeogallery di Ida Pisani, Milan

Le titre de l’exposition-performance laissait attendre la vision de quelque fétiche. En lieu et place l’on pouvait voir, après signature d’une décharge, quatre travailleurs de Livourne engagés pour montrer leur pénis. Ou comment mettre en jeu la condition du spectateur-voyeur et les rouages du capitalisme.

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Mercredi 8 septembre 2010

Anonyme, Naga Baba, 2007

Les Naga Baba, issus d’une secte shivaïte de guerriers ascètes dont l’existence remonte à trois ou quatre millénaires, clament leur détachement des affaires du monde. Ils pratiquent le yoga, le vœu de silence, la méditation, l’abstinence sexuelle ou encore des mortifications telles celles de leurs pénis. Le corps enduit de cendres provenant du feu sacré brûlant en l’honneur de Shiva, ou recueillies sur les lieux de crémation, ils allongent leur liñga par des poids, l’enroulent autour de bâtons ou le transpercent. La douleur infligée au pénis vise à le désexualiser progressivement, et garantit l’abstinence qui permet de conserver l’énergie sexuelle, source majeure de l’énergie spirituelle.

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Mercredi 1 septembre 2010

Nadar, photographies, c. 1860

Au XIXe siècle, pour la société bourgeoise française, le débat pouvait être interminable sur le sexe des anges mais devait être tranché sur celui des hermaphrodites. Ces êtres inclassables ont été livrés au regard et aux palpations des médecins et mis en scène dans des postures qui en faisaient à la fois des objets de curiosité et des figures mythologiques. Dans les années 1860, l’objectif de Nadar a servi les ambitions d’une science qui catégorisait ce phénomène physiologique naturel comme porteur de contre-valeur. (Des photographies inédites sont rassemblées dans l’ouvrage « L’Hermaphrodite de Nadar » paru chez Créaphis Éditions en 2009, avec des textes de Magali Le Mens et Jean-Luc Nancy)

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Lundi 12 juillet 2010

Claude Cahun, Autoportrait, photographie noir et blanc, c. 1927

L’ambigüité sexuelle était centrale dans le travail de Claude Cahun, qui n’a cessé de dénoncer les stéréotypes sexuels et de pointer les mécanismes de séduction. Avec son costume de boxe et ses lourds haltères portant le nom de héros masculins de mythologie ou de BD  (Castor et Pollux, Totor et Popol), elle arbore ici des signes d’hyper-féminité (cœurs sur les collants, marques à l’emplacement des mamelons, maquillage et cœurs sur les pommettes, accroche-cœurs, etc.) tout en affichant sur son justaucorps « I am in training – Don’t kiss me ». A quoi s’entraîne-t-elle au juste est-on en droit de se demander : à devenir une femme, ou bien à rejoindre un « troisième genre », à la lisière de l’homosexualité, de la bisexualité et de l’androgynie ?

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Dimanche 27 juin 2010

Matthew Barney, Cycle Cremaster, cinq vidéos transférées sur film 35 mm, 1994-2002

Le cycle cinématographique Cremaster est une œuvre foisonnante qui mêle des références à l’identité sexuelle, à l’athlétisme, à l’opéra baroque ou à la mythologie. La métaphore centrale autour de laquelle de nombreux symboles sont développés est celle du mécanisme biologique par lequel s’accomplit la différenciation sexuelle après les six premières semaines de vie utérine. Crémaster est le nom du muscle qui soulève ou abaisse les testicules selon les niveaux de températures ou d’inquiétudes. Avant qu’il ne se forme complètement chez le futur garçon, n’existe qu’une structure gonadique encore androgyne, un système reproductif indifférencié dont la forme renvoie tout autant aux testicules qu’aux trompes de Fallope. C’est cet état de potentiel pur, d’équilibre absolu, que symbolise Barney par le motif devenu sa signature, l’emblème d’un terrain ou capsule horizontalement divisé par une ligne.

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Dimanche 6 juin 2010

Marcel Duchamp, Coin de chasteté, bronze et plastique dentaire, 6 x 9 x 4 cm, 1954 – moulage 1963, Succession Marcel Duchamp-ADAGP, Paris et DACS / Feuille de vigne femelle, 1950-1951, plâtre galvanisé, 9 x 14 x 12,5 cm, collection MNAM / Couverture de la revue Le Surréalisme, même, n°1, hiver 1956

Duchamp réalisa plusieurs moulages dans les années 1950 qui expriment sa fascination pour l’ambiguïté sexuelle, comme Coin de chasteté, ou Feuille de vigne femelle. Ce dernier aurait été réalisé à partir d’un véritable sexe féminin -une expertise réalisée à la demande du Centre Pompidou l’atteste-, selon un protocole que Man Ray dit avoir effectué avec Duchamp sur le corps d’une prostituée. En utilisant cette technique, l’artiste parvient à « faire surgir une figure logique absolument bouleversante, qui est le Rien positivé » (G. Wajcman, L’Objet du siècle, Paris, Verdier, 1998, p. 149-150). L’objet obtenu, recueillant l’absence de l’objet qui le complète, restitue le creux d’une fente en relief, il devient la forme “ positive ” de l’objet moulé.
Dans un mouvement inverse, la sculpture sera photographiée pour la couverture de Le surréalisme, même 1 d’André Breton, en 1956, avec une lumière suggérant une forme concave plutôt que convexe.

coin de chasteté

feuille de vigne duchamp

le surréalisme, même

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Vendredi 4 juin 2010

Catherine Millet, La Vie sexuelle de Catherine M., Le Seuil, 2001

Dans ce livre, qui fit scandale et sensation, la critique d’art et directrice d’Art Press a cherché à « établir […] la vérité d’un être singulier ». À plus de 50 ans, elle a posé un regard de théoricienne sur l’évolution de ses pratiques sexuelles, décryptant chaque attitude comme elle l’aurait fait pour les formes utilisées par un artiste plasticien. Sur un ton volontairement neutre, elle décrit le personnage de Catherine M., qui est en grande partie elle-même et qui, pendant longtemps, a privilégié la multitude, et notamment les foules d’inconnus pour ses ébats.Dans les premières pages, elle offre son corps sans aucune appréhension, invoquant sa régularité d’humeur et sa faculté à « rentrer en elle », et plus loin, seule avec l’homme qui partage sa vie, elle expérimente une posture inverse, s’ouvrant à ce qui l’entoure : « cette joie extrême éprouvée lorsque les corps, attachés l’un à l’autre, ont la sensation de se déplier », de « s’épanouir à travers toute l’étendue visible ».

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Samedi 1 mai 2010

Pier Paolo Pasolini, Enquête sur la sexualité (Comizi d’amore), long-métrage, 90’, 1965

Le cinéma-vérité des années 60 était déjà une parodie de la télévision. Pour Pasolini, « les interviews télévisées sont les formes d’humiliation les plus basses pour un être humain » car elles « le mettent dans une position d’exposition forcée, dans laquelle on peut scruter son visage, produisant un territoire d’inconfort ». Entre anthropologue et journaliste indiscret, le réalisateur est parti à la rencontre des italiens anonymes afin de sonder leurs goûts sexuels et leur façon d’envisager la sexualité.

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